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#Camer, amis d'enfance, amis d'occasion et amis d'aujourd'hui


Dans notre triangle national, notre cher 237, nous avons passé, entre le milieu des années 70 et le milieu des années 80, une enfance de rêve que j'ai eu plusieurs fois l'occasion de décrire, dans mes multiples publications sur Nos années 80 - j'ose croire que vous avez lu le livre aussi.

Je me permets de revenir aujourd'hui sur la qualité des relations d'amitié que nous avons développées au fil du temps en la comparant aux amitiés d'un autre genre, qui semble prévaloir dans les rapports entre "jeunes" de ma génération ces temps-ci.

Lorsque nous empruntons pour la première fois le chemin de la connaissance à la maternelle, au parc Repiquet à Yaoundé (école maternelle un brin mythique car elle a créé et cimenté certaines amitiés inaltérables), nous nous lions d'amitié avec les camarades de classe dont les parents sont pour la plupart, amis aux nôtres. Malgré cela, les traits de personnalité se dessinent déjà, et les affinités naturelles se créent. Puis, après 2 années et le diplôme de la SIL - Section d’Initiation au Langage - en poche (un certificat, en fait), nous nous déportions à la fameuse Ecole Publique du Centre Administratif (plus communément appelée Ecole du Centre).



Les amitiés là-bas ne semblaient plus nécessairement liées à celles de nos parents. Les garçons les plus précoces commençant à être attirés par les filles (nous ne saurons jamais si nous les attirions aussi, car là-dessus pesait un lourd silence, une véritable omerta), les rapprochements étaient parfois circonstanciels mais entre garçons ou entre filles, ils restaient basés sur l'amitié pure, sans autres enjeux. On passait en moyenne 5 ans dans cette institution, du CP au CM2. Là, les "groupes" devenaient quasiment solides et on entrevoyait des attroupements à la récré, de 5 à 6 personnes, généralement du même sexe.

Puis, après le fameux "Concours d'entrée en 6e", nous atterrissions pour la plupart dans les établissements d'enseignement secondaire de la capitale. Il arrivait qu'on perde de vue certains amis car les parents avaient été "affectés" (selon l'expression consacrée) en province. Ensuite, l’adolescence aidant (ou pas d’ailleurs, car c’était selon), on assistait aux premières fissures dans les amitiés, fissures dont je situe l’origine à 2 niveaux: entre filles, les points de discorde venaient de leurs amourettes avec les garçons qu’elles se « discutaient » secrètement, ou même ouvertement à la récréation ; chez les garçons, il semblait plutôt s’être créé une petite rivalité entre ceux qui pouvaient « cut » les petites, et les autres qui par timidité ou mauvaise technique, n’y arrivaient pas aussi souvent. On va faire comment ?

En nous acheminant vers la sortie, entendons la terminale, les amitiés se solidifient, les couples se font et se défont, et pour certains c’est le départ pour l’étranger, pour parfaire leurs connaissances...

Entre temps, les changements politiques à la tête de l’Etat ont laissé des séquelles étranges : certains de nos amis d’origine septentrionale se sont « évaporés », on les dit à Garoua, au Nigéria, ou même tout simplement disparus. Une autre conséquence de ces changements, ce sont les « ajustements » observés dans certains cercles : subitement on n’est plus invité chez Untel ou alors on devient le nouvel ami d’Unetelle, un peu par magie... Rien de naturel, rien de ce qui nous avait unis lorsque nous étions gamins. Je note aussi que, par le simple fait que certains soient partis faire leurs études à l’étranger et d’autres soient restés, des amitiés se sont défaites sans que cela ne soit réellement discuté entre nous.

J’avance rapidement.

On a donc « étudié » dans le monde entier. Et la technologie aidant, certaines amitiés d’enfance ont résisté à la distance et au temps. Certains jeunes amoureux du lycée se sont même mariés. Puis les retours au bercail se sont effectués de manière asynchrone, beaucoup choisissant de rester vendre leurs multiples talents hors du 237.


Au fil du temps, la situation socio-économique du pays se dégradant doucement mais certainement, nos amitiés prennent encore un coup lorsque certains amis approuvent aveuglément, inconditionnellement la malgouvernance actuelle et parfois y participent ou y contribuent, non pas parce qu’ils y croient (opinion qu’on peut respecter sans pour autant partager), car ils en vivent, tandis que d’autres la critiquent. On se retrouve pourtant dans les mêmes événements culturels ou sociaux, mais on commence à sentir que des divisions se sont formées, certaines sur une base ethnique, d’autres sur une base économique, c’est-à-dire que, tandis que d'un côté, des amis de condition modeste ou alors au mode de vie réservé, mènent une vie plutôt sobre et discrète appliquant le fameux adage "pour vivre heureux, vivons cachés", des amis ayant pignon sur rue saisissent toutes les occasions pour exhiber de manière ostentatoire leur fortune, leurs biens, biens ou mal acquis. Les réseaux sociaux deviennent alors les plateformes par excellence pour afficher son statut social. À chacun son truc, rien de forcément méchant. Mais là aussi, l’impact sur les amitiés est direct et immédiat. Les plus mondains se retrouvent souvent, y conviant les nouveaux amis, refaisant le monde en se ressassant les souvenirs des derniers séjours à Dubaï.

Puis, les échanges de photos et d’opinions créant des antagonismes, les amis d’enfance de l’époque se séparent et pire, se montrent même du doigt car les valeurs qui ont sous-tendu les rapports que nous entretenions gamins, ont fait la place à d'autres mœurs, certaines plus douteuses que d'autres, qui en amitié dénaturent les rapports, les réduisent à des rapprochements calculés et parfois irréguliers, à des éloignements de façade ou de circonstances quand il ne fait pas bon d’être vu en telle ou telle compagnie.


En fin de compte, c’est un triste constat : alors que nous avons pour la plupart savouré les délices de l’amitié pure il y a moins de 50 ans, nous nous retrouvons aujourd’hui pour les uns un peu perdus essayant de les maintenir, tout simplement perdus, réalisant que certains amis ne seront plus nos amis, sans qu’on ne puisse vraiment savoir quelle aura été leur motivation première !


Si nous croyons encore en un Cameroun différent, si nous pensons encore pouvoir offrir une vision différente aux générations de nos enfants, alors dénonçons donc autour de nous ce qui semble s’apparenter à des valeurs dissolues, qui nous sont étrangères, dangereuses et ne sont pas garantes d’un avenir meilleur dans nos relations/interactions au sens social, voire sociétal du terme, surtout au sortir des derniers événements qui ponctuent la vie politique de notre cité !

Stay safe, inside and healthy my peeps, Covid is real and alive, no matter your political affiliation !

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